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Vigilance météo
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Bilan de la vague de chaleur de juillet 2019

La 2e vague de chaleur de cet été 2019 a pris fin ce 26 juillet. Très courte (5 jours), elle a cependant battu tous les records d'intensité et nous a gratifié de températures jamais atteintes en Belgique : la barre des 40°C a été dépassée pour la première fois en Belgique.

Chiffres et explications.


Des températures caniculaires ou une vague de chaleur ?

Il est utile de rappeler certains termes que l'on emploie souvent, parfois à mauvais escient : il convient donc d'abord de rappeler ici quelques définitions.

Une vague de chaleur est définie en Belgique par la succession de minimum 5 jours de températures maximales supérieures à 25°C, dont au moins trois sont supérieures à 30°C. (Station de référence : Uccle)

Une journée de canicule est une journée durant laquelle la température est montée au dessus de 30°C, une journée d'été est une journée durant laquelle la température maximale a dépassé les 25°C.
On peut donc aussi reformuler la définition de vague de chaleur par une période comptant minimum 5 jours d'été successifs, parmi lesquels on retrouve au moins trois jours caniculaires. Ce fut donc bien le cas ici.

 La vague de chaleur : elle fut, ici en Belgique, courte mais extrêmement intense.

Si elles ne sont pas rares, chez nous, les vagues de chaleur ne se présentent cependant pas chaque année. Un dossier d'étude statistique des vagues de chaleur en Belgique depuis 1901 avait été publié : vous retrouverez le lien ici.
 
Voici d'ailleurs, tiré de cet article un graphe mis à jour avec les données de la vague de chaleur que l'on vient de connaître (en rouge).
Différents paramètres sont repris :
 
  • La durée : le nombre de jours de la vague de chaleur.
  • Le poids : en degrés jours avec 20°c de température moyenne comme référence : une température moyenne de 22.3°C aura un poids de 2.3, une de 19.5°C un poids de -0.5
    On fait la somme de ces degrés jours pour toute la période répondant à la définition de vague de chaleur.
  • L’intensité : ou le poids par rapport à durée : des vagues de chaleur peuvent être longues et modérées, d’autres courtes mais intenses. Ce paramètre nous permettra d’avoir un indicateur intéressant à ce niveau.
Nous y retrouvons en abscisse l'intensité de la vague de chaleur, en ordonnée le nombre de jours de la période de la vague de chaleur. La taille des sphères (une par vague de chaleur) est proportionnelle au poids de la vague de chaleur tel que défini ci-dessus.  Les couleurs des sphères sont les suivantes : jaunes, pour les années avant 1988 et oranges après cette date, date à laquelle le réchauffement climatique a commencé à se faire sentir de façon plus nette en Europe. La sphère de couleur rouge est celle de cette vague de chaleur de juillet 2019, afin de pouvoir plus facilement les comparer avec les autres.



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Après une une première vague de chaleur modérée en fin juin 2019 (voir notre article ici), la Belgique en a connu une seconde, très courte, avec une intensité record (6.94).  Son poids fut de 34.7.

Pour Uccle, la journée la plus chaude de cette vague de chaleur fut celle du 25 juillet 2019 avec 39.7°C, et pour le territoire belge c'est Begijnendijk (Brabant flamand) qui a enregistré la plus haute valeur ce jour-là également : 41.8°C. Vous trouverez les valeurs de température maximum de ces deux jours sur notre site, ici sur cette page.On a également connu 3 nuits tropicales (minimum de la nuit supérieur à 20°C) sur la période. 

Les températures les plus chaudes de cette vague de chaleur en Belgique, ont été enregistrées généralement le 26 juillet; sur le territoire belge on a même dépassé deux jours la barre des 40°C pour la première fois depuis le début des mesures météorologiques (à partir de 1833 pour Uccle) : 40.2°C à Angleur le 24 juillet et dans de nombreuses stations du réseau officiel le 25.
L'indice humidex y a même largement dépassé les 45, ce qui est sans doute une première en Belgique.

Conclusions

Que peut-on en déduire ?

Ce qui saute aux yeux directement lors de l'analyse de cette vague de chaleur c'est son intensité : 6.94. Jusqu'avant 2003, aucune des vagues de chaleur n'avaient atteint une intensité de 4. depuis, et jusque ce début du mois de juillet 2019 il y en avait eu pas moins de 4 : 2003, 2006, 2015 et 2017. Cette dernière la plus intense, avec 4.47. Nous nous attendions tôt ou tard en avoir une supérieure à 5. Celle-ci ne fut pas de 5. Ni même de 6. Mais pas une de presque de 7 comme celle que nous venons de vivre !
 
Idem pour les températures les plus chaudes enregistrées lors de cet épisode, avec la barre des 40°C qu'on pensait difficile, sinon impossible à atteindre . Pour la première fois sans doute de l’histoire de la météo en Belgique, TOUTES les stations ont vu leur record de température absolus (tous mois confondus) battus. Non, pas battus, nous devrions dire explosé. Généralement quand un record mensuel de température est battu, il est battu de quelques dixièmes voire un degré tout au plus. Ici ce n'est pas d'un ni de deux, mais souvent de trois degrés que les records ont été battus. Et que penser du record de Coxyde ? Il a été battu de... 4°C (le record de 40.2 bat l'ancien qui était de 36.2) ! 
 
Jusqu'il y a peu, les vagues de chaleur restaient rares : 27 seulement durant le XXe siècle, soit environ une tous les 4 ans en moyenne, même si il y a eu de périodes avec plus de vagues de chaleur, voire deux, voire trois par an, il y a aussi eu des périodes de plus de 10 ans sans la moindre vague de chaleur.
Pourtant le XXIe siècle, et surtout les années récentes ont changé la donne. Depuis 2001, en 19 ans, on est déjà à 12. Et depuis 2015, il y en a eu au moins une chaque année. Là aussi cela interpelle.
 
Est-ce un effet du réchauffement climatique ? Si un élément pris isolément ne pourra jamais être imputé au réchauffement climatique, l'augmentation de la fréquence, de la durée et surtout de l'intensité des vagues de chaleur récentes ne laisse à présent que peu de doutes vu la répétition de ces vagues de chaleur, à l'augmentation rapide de leur intensité, etc.
On était déjà pas passé loin de records possibles en juin (finalement seule la France a dégusté) mais on en n'était pas passé loin. Cette fois-ci c'était pour nous avec des températures inédites.
Bien sur la synoptique était parfaite pour des températures record. On est bien d'accord. Mais de là à les battre de 3 ou 4 degrés...

On est bien d'accord aussi que la situation de minimum solaire comme actuellement est aussi propice à des vagues de chaleur, alors qu'a priori on pourrait penser le contraire. Bon nombre de grosses vagues de chaleur ont eu lieu lors de ces minima : 2010, 1976, 1911...
La raison est due en partie à l'augmentation de l'amplitude des ondes de Rossby dans l'atmosphère qu'on peut aisément détecter par la position des courants jets d'altitude. Au sud des courants jet, ce sera anticyclonique. Au nord, dépressionnaire. Quand l'oscillation des ondes de Rossby est faible, on aura une situation typique de NAO+: les dépressions ne passeront pas loin de nos régions (plus près de nous en hiver qu'en été), alors que les anticyclones ne se mettront pas loin des zones méditerranéennes : dans pareil cas, le temps sur nos régions sera doux et pluvieux en hiver et plutôt assez frais et humide en été. Cette situation est plus marquée lors des maxima solaire, durant laquelle l'amplitude des ondes de Rossby est moins marquée. Par contre comme l'amplitude des ondes est plus marquée lors de minima solaire, la situation sera propice à des blocages oméga, propice aux vagues de chaleur (voir article sur les vagues de chaleur sur notre site ici) si elles sont bien placées pour nous. A contrario, d'autres régions de l'hémisphère vont être plutôt dans des courants froids et polaires.
C'est le même phénomène qui peut expliquer les vagues de froids en hiver lors de minima solaires, si nous sommes "bien" placés du côté froid de l'onde de Rossby.
Or, pour terminer ceci, il semble que le réchauffement climatique accentue aussi l'amplitude des ondes Rossby, avec des remontées chaudes (et froides de l'autre côté) nettement plus fortes et qui arrivent de plus en plus souvent aux pôles (on en n'a pas parlé mais on a atteint 21°C début juillet à 400 km seulement du pôle nord).
 
Bref, on espère se tromper, mais on dirait que depuis 2010 le difficile équilibre climatique de la terre est mis particulièrement à mal. Avec quelles conséquences ? Devrons-nous craindre une augmentation des vagues de chaleur et de leur intensité dans les prochaines années ou prochaines décennies ? Il semble malheureusement que oui, et c'est dramatique, parce que ni nos habitations, ni nos villes, ni notre infrastructure (regardez ne fût-ce que les pannes du réseau ferroviaire de ces derniers jours), ni nos forêts et cultures ne sont préparées à cela. Et nous ne parlons même pas des conséquences indirectes des vagues de chaleur comme les orages diluviens et ravageurs. 
Maintenant, soyons aussi vigilants aux réactions politiques extrêmes : entre le nihilisme de Trump et la dictature verte des sympathisants de Thunberg, il y a peut-être de la place pour des actions cohérentes et réfléchies.
 

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